Les personnes veulent se reconnaître dans les entreprises dont elles consomment les produits. Pour un marketing et une communication plus efficaces, Sébastien Durand et Jérôme Lecombe nous expliquent l’importance de la diversité et de l’inclusion.
Mieux comprendre ses clients en leur ressemblant plus
Le marketing peut être défini comme « le moyen d’action qu’utilisent les organisations pour influencer en leur faveur le comportement des publics dont elles dépendent » (Arnaud de Baynast et al., Mercator). Il s’agit donc d’une démarche engagée permanente pour mieux connaître ses cibles, afin d’adapter sa stratégie et proposer aux consommateurs une valeur perçue comme supérieure à celle de la concurrence.
Or, pour saisir les clients dans toute leur complexité, quoi de mieux que de commencer à incarner cette multiplicité en interne ? C’est le premier critère qui a amené les entreprises à embrasser la diversité.
Je découvre un extrait du livre
Représenter en interne vos cibles actuelles… et les futures
Cette diversité en interne est d’ailleurs aujourd’hui un « attendu » des client·e·s. Comment penser en effet qu’une marque est sincère si elle n’offre pas à l’ensemble de ses collaboratrices et collaborateurs d’égales chances alors qu’elle s’adresse à une clientèle issue de ces mêmes communautés ? Ces dernières sont 69 % à estimer plus authentiques les marques qui sont réellement diverses dans leur représentation. (Accessible sur le 5WPR 2020 Consumer Culture Report). Christophe Fuss, directeur général adjoint de TUI France, explique : « des collaborateurs nous ont sensibilisés aux besoins spécifiques de segments de clientèle auxquels ils appartiennent. Cela nous a permis de revoir nos messages, de mieux les cibler, et de trouver des relais de croissance. »
De plus, même si ce phénomène reste peu étudié, certaines niches de consommateur·rices peuvent être attirées par des marques mais craindre que ces dernières ne prennent pas en compte leurs besoins particuliers. En montrant les personnes qui y travaillent issues de ces mêmes niches, les entreprises envoient un signal « je vous vois » à ces groupes de cliente·s et développent avec eux un sentiment d’appartenance.
Des produits plus inclusifs pour des cibles plus diverses
Au-delà d’une question de représentation en miroir de la clientèle existante, une stratégie marketing focalisée sur la diversité et l’inclusion évite également de passer à côté de personnes qui auraient peut-être ignorées vos produits. « En vous assurant d’afficher la diversité, vous augmentez le nombre de vos clients potentiels. » (Etude Censuswide pour Shuttertock, 2021.)
Ainsi, l’entreprise SEB a mis au point en 2018 le Good Design Playbook, un guide des bonnes pratiques de conception pour des produits et des services accessibles à toutes et à tous. L’enjeu est d’améliorer le quotidien des personnes en situation de handicap ou de perte d’autonomie dans les usages de la vie courante, à partir d’un besoin universel : cuisiner. Les appareils sont co-conçus avec l’aide d’un panel de personnes en situation de handicap (aux modes de vie différents). Pour 2023, le groupe se donne comme objectif de « développer une gamme produits au design inclusif par catégorie de produits. »
Comme l’entreprise ne pourra jamais représenter l’ensemble des diversités existantes, elle a tout intérêt à développer les processus de co-création en s’entourant de personnes issues de différentes communautés.
L'industrie du jouet et le marketing de genre
Les puzzles pour filles ont moins de pièces que ceux destinés aux garçons ! cf site
La longue histoire des jouets montre que le marketing de genre a un impact profond sur la construction psychologique des enfants (voir : www.elizabethvsweet.com/). Sur un siècle, on peut constater que les jouets pour les filles sont passés du type « petite ménagère » à « princesse » et pour les garçons de « jeune bricoleur » à « super-héros », une évolution qui reflète peut-être les aspirations propres à chaque genre, mais qui ne change malheureusement pas les silos !
En 2019, le gouvernement français a donc réuni les acteurs de la filière jouets (fabricants, distributeurs, annonceurs) qui ont pris l’engagement de ne plus segmenter ou décrire leurs produits par « genre » mais simplement par « catégorie de jouet » ou par « âge », de supprimer les filtres de navigation par genre sur leurs sites, d’utiliser des visuels majoritairement mixtes et des couleurs neutres dans leur communication.
Le marketing, qui a été un pionnier de la segmentation – on parlerait aujourd’hui de marketing communautaire –, a aussi paradoxalement (ou pas ?) contribué à renforcer les stéréotypes de genre. « Vous pouvez avoir un produit qui est complètement mixte, par exemple une trottinette ou une tablette tactile », explique-t-on chez JouéClub (S. Aurenche, ≪ Bientot la fin des jouets pour filles ou pour garcons ? ≫, rtl.fr, 2021.). « Mais pour en vendre plus, il faut en faire dans deux coloris différents : ça donne deux parts de marché. Alors, au lieu d’acheter une seule trottinette pour toute la famille, vous en prenez deux, une rose pour votre fille et une bleue pour votre fils. »
Plus récemment, c’est Lego qui a annoncé retirer la mention « pour filles » ou « pour garçons » sur ses produits, après une étude portant sur 7 000 parents d’enfants âgés de 6 à 14 ans, montrant notamment que 7 garçons sur 10 n’osaient pas jouer avec des « jouets de filles », de peur qu’on se moque d’eux (N. Herami, ≪ Lego va bientot proposer des jouets non-genres ≫, rtl.fr, 2021. ! Un retour en arrière ironique pour la marque qui présentait jadis aussi bien des garçons que des filles dans ses pubs, avant de se mettre à concevoir des produits plus segmentés, toujours basés sur la construction pour les garçons, et s’apparentant plus au jeu de rôle pour les filles (comme la gamme Lego Friends). Au moment de la rédaction de cet ouvrage, son site français propose d’ailleurs toujours une entrée : « Jouets Lego pour filles (Sur le site www.lego.com/fr-fr/toys-for-girls) ».
Au-delà du genre, c’est sur l’ensemble des stéréotypes que la filière jouets peut agir au moment où les enfants construisent leur personnalité. Lego s’est d’ailleurs engagé à proposer des produits plus inclusifs, qui vont des personnages en fauteuil roulant aux briques Lego Braille (pour apprendre ce système d’écriture par le jeu, une innovation co-construite avec des associations de non-voyants (« Lego devient inclusif et lance une gamme de blocs pour enseigner le braille aux enfants aveugles et malvoyants », gusandco.net, 2019.) en passant par un kit LGBT aux couleurs de l’arc-en-ciel !
Diversité et inclusion - Incarner ses valeurs pour mieux les communiquer
Les notions de diversité et d’inclusion sont désormais incontournables et pourtant beaucoup d’entreprises peinent à réaliser qu’elles sont déjà plus diverses qu’elles ne le pensent mais moins inclusives qu’elles ne le proclament.
L’ouvrage Diversité et inclusion montre l’importance pour chaque personne de dépasser ses préjugés au niveau individuel et dévoile une méthode exclusive pour permettre aux entreprises de s’emparer du sujet afin de considérer l’ensemble de leurs collaborateurs et collaboratrices dans leur unicité.