Interview de Jean-Pierre Houppe pour son livre "Prendre soin de son coeur, Introduction à la psychocardiologie"
Prendre soin de son cœur, c’est aussi prendre soin de soi et apprendre à mieux gérer ses émotions. Dans Prendre soin de son cœur (Dunod, 2016), Jean-Pierre Houppe propose un cahier d’accompagnement qui informe le patient sur les relations cerveau-cœur et l’importance de savoir prendre soin de soi avec de nombreuses techniques pour faire du cerveau un allié du cœur… Un ouvrage qui permet à chacun de trouver parmi les outils proposés ceux qui lui conviendront le mieux pour se prendre en charge en toute autonomie et prendre soin de son cœur…
Qu’est-ce que la psychocardiologie ?
La psychocardiologie est une discipline récente dont le nom est apparu dans les revues scientifiques il y a environ sept ou huit ans. La cardiologie quant à elle est la discipline où l’on a le plus démontré le rôle de tous les facteurs psychiques dans le déclenchement et l’aggravation de la maladie, en particulier tout ce qui est pathologie cardiaque coronaire. Dans psychocardiologie, il y a deux aspects, d’une part le risque de déclenchement et d’aggravation de la maladie, d’autre part la prise en charge de la souffrance psychique lors de la survenue d’un accident cardiaque.
La psychocardioliogie représente vraiment un changement de paradigme, on n’est plus dans une médecine biologique et physiologique mais dans une intégration biopsychosociale. On peut aussi parler de cardiologie comportementale, ce qui en France constitue une approche nouvelle.
Pourquoi est-il important de comprendre la relation cerveau-cœur ?
Le cerveau est notre principal outil d’adaptation, notre « général en chef ». Il a évolué depuis que l’homme existe pour lui permettre de s’adapter, le système cardiovasculaire étant quant à lui le système effecteur. Ainsi le système cardiovasculaire est à l’origine d’un certain nombre de réactions physiologiques, telles que la montée de la tension artérielle ou l’accélération cardiaque pour échapper à un danger. L’adaptation est commandée par le cerveau mais c’est le système cardiologique qui a un rôle effecteur. Il y a une relation majeure entre le cerveau reptilien et nos réactions basiques de survie. Or ces réactions ne sont pas toujours indispensables et c’est le néocortex (cerveau supérieur) qui peut comprendre les facteurs psychiques et éviter des réactions de stress et de survie qui ne sont pas nécessaires.
Notre cerveau peut donc être un allié extraordinaire mais il peut aussi être un bourreau du cœur, quand le cerveau limbique émotionnel domine et qu’il déclenche le cerveau reptilien. Toute la gestion des facteurs psychiques en cardiologie va consister à mieux gérer les émotions grâce à des outils corporels et à des facteurs cognitifs, pour faire évoluer son comportement. Il faut que le cerveau le plus intelligent, qui est le plus développé, arrive à mettre un peu de conscience dans les émotions.
Que proposez-vous au patient avec ce cahier, une forme d’auto-éducation ?
Oui, ce cahier constitue une forme d’autoéducation au bon sens du mot éducation, pour que le patient puisse avoir un autre regard sur sa problématique cardiaque. Cela permet de modifier le regard sur soi. Le livre s’adresse au patient dans un langage clair, j’explique d’abord d’où vient le cerveau, comment il est formé afin de faire comprendre comment mieux gérer nos émotions. Puis je précise comment le cœur est formé, les relations cœur-cerveau et j’aborde ensuite tous les outils dont on dispose pour prendre soin de soi. Il s’agit de prendre la substantifique moelle des techniques pour l’appliquer au quotidien. C’est ouvrir une porte pour aller plus loin et se prendre en charge, cela met le patient en autonomie de se diriger selon ses propres souhaits. Je propose des outils et chacun fait ce qui lui convient en son propre nom.
Ce qui me semble intéressant, c’est que même si l’ouvrage est destiné aux patients, il est recommandé qu’il soit communiqué aussi aux médecins et aux cardiologues.
Ce cahier propose de nombreuses techniques pour prendre soin de soi, comment s’y retrouve-t-on ?
Je me suis rendu compte que souvent les gens ne lisent pas tout l’ouvrage de façon classique. Certains patients vont aller directement vers les outils qu’ils veulent découvrir et progressivement revenir en arrière. Un patient qui aborde l’ouvrage en guise de prévention, va peut-être juste s’arrêter aux méthodes pour prévenir le risque cardiaque. L’ouvrage permet aux lecteurs d’être indépendants, les patients sont libres de picorer et de s’autoriser à sauter des pages. Les patients sont demandeurs d’outils et de méthodes de prévention et je leur propose avec cet ouvrage différentes alternatives en privilégiant les outils que je connaissais, afin qu’ils restent autonomes dans leurs choix.