Les TPE-PME comme véritable moteur du progrès technologique, environnemental et social. C’est ce que soutient Bernard Cohen-Hadad dans son ouvrage L’avenir appartient aux PME.
Monsieur Cohen-Hadad, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Assureur de métier, je suis de longue date engagé pour la promotion d'une certaine idée de l'entrepreneuriat et de la représentation des entrepreneurs de TPE et de PME.
J'anime la CPME Paris Île-de-France. Je préside aussi le think tank Etienne Marcel, que j'ai fondé. Je participe par ailleurs à l’Euro Retail Payment Board (ERPB), au Comité national des moyens de paiement (CNMP) et au Comité pour l’éducation financière (EDUCFI). Je m'engage aussi dans le débat public en intervenant régulièrement dans les médias.
Dans mon métier et dans ces différents mandats, responsabilités et interventions, je m'efforce d'œuvrer, avec l'énergie de mes convictions, à la promotion d'un entrepreneuriat responsable et citoyen en France.
Votre ouvrage a pour ambition de replacer les PME au centre du débat économique. Pourquoi en sont-elles éclipsées ?
Au sein de l'écosystème entrepreneurial, les TPE-PME sont en effet trop souvent éclipsées, dans le débat médiatique comme dans l’action publique, du fait d’une bipolarisation de l’attention entre les start-ups et les grandes entreprises. Paradoxalement, les Français ont pourtant majoritairement une meilleure image des TPE-PME que des autres entreprises.
Les raisons de cette "éclipse" sont nombreuses. L'une d'entre elles est probablement l'insuffisante connaissance et valorisation des atouts et des apports des TPE-PME à notre vie économique, mais aussi, et plus largement, à la vie collective de nos territoires.
C'est précisément l'ambition modeste de L'avenir appartient aux PME : contribuer, sans prétendre épuiser le sujet, à mieux faire connaître et valoir ces atouts et ces apports.
Vous présentez les multiples défis auxquels vont être confrontées les PME. Pouvez-vous nous en présenter quelques-uns ?
Les défis sont nombreux. Après avoir démontré leurs capacités d’agilité et d’adaptation à travers les crises (Covid, Ukraine, inflation, pénurie énergétique…), les dirigeants de TPE-PME doivent désormais relever plusieurs défis, en plus, bien sûr, de la bonne conduite de leurs activités : les préoccupations environnementales, sociale et de gouvernance (ESG) et la décarbonation ; la prise en compte du changement de l’engagement et du rapport au travail ; les pénuries de main-d’œuvre et la "guerre des talents" ; l’évolution du rapport de force entre les employeurs et leurs employés, avec le regain par ces derniers d’un pouvoir de négociation ; le pouvoir d’achat et le partage de la valeur, etc.
Plus largement, l'entreprise ne saurait être durablement prospère dans une société et dans un monde qui ne le seraient pas aussi. Elle doit par conséquent être utile pour le plus grand nombre. L'entreprise “citoyenne” assume pleinement son rôle dans la vie de son territoire, en déployant une démarche de “responsabilité sociétale des entreprises” (RSE) qui intègre volontairement à ses activités commerciales et à ses relations avec les parties prenantes les enjeux ESG, de sorte de rester économiquement viable tout en ayant un impact positif sur la société et dans le monde.
Au moment où les entreprises sont de plus en plus citoyennes, les citoyens, de leur côté, notamment les jeunes, font de plus en plus confiance aux entreprises pour être les forces motrices des transitions et des progrès sociaux, sociétaux, environnementaux et numériques dans leurs territoires. Et ils sont de plus en plus eux-mêmes entrepreneurs, pour retrouver du sens au travail. L'un des plus grands défis pour les TPE-PME, c'est ainsi de répondre aux attentes que les citoyens peuvent attendre d'elles. C'est une marque de confiance. Il faut être à la hauteur.
Ce n'est pas de la bienveillance du boucher, du brasseur ou du boulanger que nous attendons notre dîner, mais plutôt du soin qu'ils apportent à la recherche de leur propre intérêt
Adam Smith
En quoi les PME sont-elles plus aptes que les grands groupes ou les start-ups à accompagner les changements économiques et sociétaux ?
Pour une raison simple : parce que c'est leur intérêt. Adam SMITH l'avait résumé dans une célèbre formule : "ce n'est pas de la bienveillance du boucher, du brasseur ou du boulanger que nous attendons notre dîner, mais plutôt du soin qu'ils apportent à la recherche de leur propre intérêt".
Les TPE-PME ont un intérêt évident à être au cœur de l'innovation et à agir en faveur du progrès.
Entreprises de proximité, à taille humaine, résolument agiles, elles sont en prise directe avec le territoire où elles sont ancrées. Les entrepreneurs de TPE-PME sont des porteurs authentiques des valeurs de proximité, d'humain, de sens. Ils ont une connaissance fine des besoins, des attentes et des espoirs de la communauté. Dans leur territoire, les TPE-PME sont les forces motrices des transitions et des progrès sociaux, sociétaux, environnementaux, numériques, car leurs intérêts économiques y convergent au plus près de l'ambition collective, souhaitable et possible, d'une économie plus verte, plus humaine, plus responsable.
Après la "start-up nation", place à la "PME Nation" ?
Oui. C'est le vœu le plus cher que je forme pour la France et les Français. Car si entreprendre en TPE-PME, c'est assumer plus de responsabilités, c'est aussi jouir de plus de liberté. Or, il n'y a pas de bonheur sans liberté. Ni, donc, sans entrepreneuriat.
L'avenir appartient aux PME - Environnement, IA, progrès, lien social... Pourquoi les PME sont la clé des enjeux de demain
Dans son ouvrage, Bernard Cohen-Hadad montre qu’aucun des grands enjeux auxquels la France doit faire face ne trouvera de résolution sans la participation active d’un tissu de PME reconnues à leur juste valeur, et livre ses pistes pour remettre les PME au cœur des débats.